«- Vu l'ancienneté des faits, il sera sans doute compliqué de les faire établir, et vraisemblablement, votre père ne sera pas condamné...- Alors, il y a des faits plus récents, qui ont eu lieu à Nancy, à Nice, à Paris et à Tende, il y a deux ans. Ce serait peut-être plus facile...- Certainement.- Mais j'étais majeure.- Ça reste des viols par ascendant, madame. Et qui ont eu un commencement d'exécution quand vous étiez mineure. Moi, je vais le faire convoquer dans un commissariat de Strasbourg. Il aura une grosse frayeur. Il sera difficile d'apporter les preuves. Il y aura sans doute un non-lieu...»Christine Angot nous livre un roman d'une puissance inouïe, qui ausculte l'inceste en creusant les points de vue de l'enfant, de l'adolescente, de la jeune femme, violée par son père.
"Je traversais la rue... Vincent passait sur le trottoir d'en face. Je me suis arrêtée au milieu du carrefour. J'étais là, figée. Le coeur battant. Je regardais son dos qui s'éloignait. Torse large, hanches étroites, il avait une stature impressionnante. J'aurais pu courir, le rattraper. Il a tourné au coin de la rue. Je suis restée debout, les jambes coupées. Les yeux fixés sur la direction qu'il avait prise. Je tremblais. Je n'arrivais plus à respirer. J'ai pris mon téléphone dans mon sac, j'ai appelé une amie."
Dans son septième livre, Christine Angot continue de se raconter. Cette fois il est question d'homosexualité, d'inceste et surtout de folie, cette violence qui emporte tout sur son passage, qui provoque en elle « des sensations d'étouffement, des vomissements, des nausées, des colites, des insomnies, des crises, des envies de suicide ». Ce récit hystérique loin de tout sentimentalisme et de toute niaiserie s'ouvre sur une rupture après une passion amoureuse et homosexuelle de trois mois.
L'écrivain avait impressionné au moment de la parution de son premier roman. Avec L'Inceste , elle reçoit l'accueil favorable de la critique qui y voit l'un des événements de la rentrée littéraire 1999.
Pierre et Rachel vivent une liaison courte mais intense à Châteauroux à la fin des années 1950. Pierre, érudit, issu d'une famille bourgeoise, fascine Rachel, employée à la Sécurité sociale. Il refuse de l'épouser, mais ils font un enfant. L'amour maternel devient pour Rachel et Christine le socle d'une vie heureuse. Pierre voit sa fille épisodiquement. Des années plus tard, Rachel apprend qu'il la viole.
Le choc est immense. Un sentiment de culpabilité s'immisce progressivement entre la mère et la fille. Christine Angot entreprend ici de mettre à nu une relation des plus complexes, entre amour inconditionnel pour la mère et ressentiment, dépeignant sans concession une guerre sociale amoureuse et le parcours d'une femme, détruite par son péché originel : la passion vouée à l'homme qui aura finalement anéanti tous les repères qu'elle s'était construits.