Si Éric Zemmour veut récrire l'histoire de Vichy et de la persécution des juifs, c'est qu'il cherche à rendre légitimes des politiques disqualifiées depuis les crimes de la collaboration : mettre à bas l'État de droit, stigmatiser des minorités, expulser un million d'étrangers...Se fondant sur des sources inédites, exhumant des controverses oubliées, Laurent Joly démontre que le polémiste n'hésite pas à manipuler et à falsifier les faits historiques afin d'unir les droites sous l'étendard de la haine de l'étranger.Par cet essai puissant et engagé, l'auteur met un point d'honneur à rétablir la vérité historique à l'ère de la malhonnêteté intellectuelle triomphante.
29 décembre 1890, Dakota du Sud, États-Unis : 300 Sioux Lakota sont massacrés par un régiment de l'armée américaine à Wounded Knee. Cette bavure militaire d'une ampleur inouïe n'épargne ni femme ni enfant, et provoque la mort de Big Foot, l'un des derniers grands chefs indiens. La résistance du peuple sioux, converti de force à l'American way of life, s'achève dans le sang. Et alors qu'articles et témoins se bousculent pour relayer la violence du drame, le jugement qui s'ensuit désespère les tribus visées et soumet au silence les survivants.Cent trente ans après les faits, l'archéologue Laurent Olivier livre une enquête inédite sur les causes multiples de ce massacre. Entre histoire, reportage et essai, cet ouvrage fait la lumière sur l'un des derniers grands conflits indiens de l'histoire américaine et, par les faits et par l'image, appelle à la justice en apportant les preuves qui manquaient encore à l'établissement de la vérité.
Histoire politique de l'Iran de la dynastie qâjâr (1797-1925), à laquelle succéda celle des Pahlavi, jusqu'à la révolution islamique née en 1979. Un nationalisme particulier, inséparable de la religion, s'y développa dès le XIXe siècle, en réaction contre les souverains autocrates qui vendaient les richesses du pays aux Russes et aux Britanniques.
Avec cette somme magistrale, Peter Frankopan renverse le récit traditionnel de l'histoire mondiale, qui gravite autour de la Grèce antique, de Rome et de l'irrésistible ascension de l'Occident - une approche réductrice, qui méritait une relecture approfondie.Élargissant la perspective, Frankopan se tourne vers «une région située à mi-chemin entre Orient et Occident, qui va des rives orientales de la Méditerranée jusqu'à la mer Noire et à l'Himalaya». C'est là, au carrefour des civilisations, qu'il situe le centre névralgique du globe. Et c'est les yeux rivés sur ce «coeur du monde» que, des campagnes d'Alexandre le Grand aux luttes géopolitiques du XXIe siècle, il retrace avec brio 2 500 ans d'histoire.Salué par la presse internationale comme «le plus important livre d'histoire publié depuis des décennies», Les Routes de la soie est un voyage grisant à travers les siècles, qui décentre avec audace le regard du lecteur pour éclairer d'une lumière nouvelle notre compréhension du monde.
Après les industries lourdes, automobiles, électroniques, la Corée est en passe de réussir dans de nouveaux domaines où on ne l'attendait pas : le cinéma, les livres ou encore la musique. Une conquête mondiale, un soft power presque parfait qui hisse désormais le pays au rang des nations les plus développées...Pourtant, la péninsule hyper connectée et résolument tournée vers l'avenir a connu des heures sombres : après son annexion par l'empire japonais en 1910, la nation disparaît de la scène mondiale et ne réapparaît qu'avec la guerre de Corée.Dans cet ouvrage, Samuel Guex raconte la longue histoire d'un pays qui se réinvente sans cesse et ne renonce jamais. Mêlant son récit aux débats actuels qui agitent les Coréens - et la Réunification n'est pas l'un des moindres -, il montre à quel point le passé reste fondamental pour comprendre la modernité de la Corée...
Les femmes font aujourd'hui du bruit ? C'est en regard du silence dans lequel les a tenues la société pendant des siècles. Silence des exploits guerriers ou techniques, silence des livres et des images, silence surtout du récit historique qu'interroge justement l'historienne. Car derrière les murs des couvents ou des maisons bourgeoises, dans l'intimité de leurs journaux ou dans leurs confidences distraites, dans les murmures de l'atelier ou du marché, dans les interstices d'un espace public peu à peu investi, les femmes ont agi, vécu, souffert et travaillé à changer leurs destinées.Qui mieux que Michelle Perrot pouvait nous le montrer ? Historienne des grèves ouvrières, du monde du travail et des prisons, Michelle Perrot s'est attachée très tôt à l'histoire des femmes. Elle les a suivies au long du XIXe et du XXe siècles, traquant les silences de l'histoire et les moments où ils se dissipaient. Ce sont quelques-unes de ces étapes que nous restitue ce livre.
De quelle Russie Poutine est-il le maître ? Pour unifier ce peuple pluriel conquis par les Vikings et les Mongols, sans frontières naturelles, aussi européen qu'asiatique, la Russie a fait de ces multiples influences son identité propre, quitte à en forger les légendes. Mais, en jouant de ce passé, elle s'est enfermée et contrainte dans ses rapports avec le monde extérieur. Telle est la thèse de Mark Galeotti qui, en relatant avec brio son histoire en quelques chapitres enlevés, nous donne les clés pour comprendre ce pays. Une réflexion passionnante et très accessible pour mieux comprendre la figure de Vladimir Poutine et la crise géopolitique actuelle.
Il fut un temps où tous les chemins menaient à Rome... Aujourd'hui, ils mènent à Pékin. L'Europe peine à penser son avenir face aux populismes et aux crises migratoires, tandis que les Etats-Unis ont engagé un retrait inédit des affaires internationales, au risque de menacer d'anciens alliés. Pendant ce temps, un vent d'espoir souffle le long des antiques routes de la soie. Du Moyen-Orient à la Chine, de la Russie à l'Iran, les échanges se multiplient, les pays coopèrent et de nouvelles alliances sont scellées, faisant fi d'antagonismes dépassés.
Le contraste est saisissant avec ce qui se joue à l'Ouest. Peter Frankopan brosse le tableau aux mille nuances du monde actuel et explique pourquoi il est essentiel d'en comprendre les bouleversements. Dans cet ouvrage magistral, l'historien à la renommée internationale reprend le fil de l'histoire là où Les Routes de la soie (2015) l'ont laissé. Ces routes sont désormais en pleine expansion. Quels changements leur développement impliquera-t-il pour demain ? Quelles seront les répercussions de ce grand basculement des centres de pouvoir ?
Le 20 août 1700, à Salvador de Bahia, au Brésil, «la noire Pascoa aujourd'hui libre, qui fut la captive de Francisco Álvares Tavora», est arrêtée par l'Inquisition. Elle est embarquée sur un bateau vers Lisbonne où siège le tribunal du Saint-Office. Pascoa est accusée de bigamie : elle s'est mariée au Brésil alors que son premier conjoint, épousé en Angola, est encore vivant. Les sources du procès de Pascoa nous sont parvenues, mettant au jour la réalité des sociétés esclavagistes de l'Atlantique Sud ainsi que le contrôle de l'Église exercé tant sur les esclaves que sur leurs maîtres. Les minutes du procès témoignent du caractère pointilleux de la justice inquisitoriale, dont l'enquête est menée sur trois continents, révélant ainsi une étonnante préoccupation pour le mariage des esclaves. Elles donnent la parole à une femme qui, face au terrible Tribunal de la Foi, ne s'avoue jamais vaincue. C'est la voix de Pascoa que ce récit fait entendre.
Notre espèce Homo sapiens saura-t-elle s'adapter aux conséquences fulgurantes de son succès depuis 40 000 ans et à son amplification sans précédent depuis un demi-siècle ?
Il n'y a pas si longtemps, plusieurs espèces humaines se partageaient la Terre et échangeaient des techniques et des gènes. Puis des populations sapiennes plus récentes (notre espèce), sorties d'Afrique, sont parties à pied et en bateau à la conquête du monde jusqu'en Australie et aux Amériques, avant d'écarter les Néandertaliens d'Europe ou les Dénisoviens d'Asie, parmi d'autres.
Telle est la splendide aventure que raconte cet essai. Mais cette étonnante capacité d'acclimatation des hommes depuis plus d'un million d'années pourra-t-elle servir notre adaptation dans un monde urbanisé, connecté, pollué, menacé par des pandémies, comme la Covid-19, et aux écosystèmes dévastés ? Car l'évolution continue.
Avec ses talents de vulgarisateur hors pair, Pascal Picq interroge les notions de progrès et d'évolution en explorant comment le succès inégalé de Sapiens le rend désormais seul responsable de son devenir : Sapiens est face à Sapiens.
Présidant au rythme de la vie rurale, orientant son espace, la cloche définit une identité, cristallise un attachement à la terre, organise un ordre symbolique. Les nombreuses anecdotes et légendes à ce sujet témoignent des passions et croyances d'un monde et d'une époque, la sonnerie d'une cloche pouvant traduire la liesse, la terreur des épidémies, la menace du feu, etc.
« Fake news», « infox », « post-vérité » : le monde contemporain ne cesse d'être confronté aux enjeux de l'information de masse. On croyait la propagande disparue avec les régimes totalitaires du XXe siècle mais, à l'ère de la révolution numérique et des réseaux sociaux, elle est plus présente et plus efficace que jamais. Chaque jour apporte ainsi son lot de désinformation, de manipulation, de rumeurs et de théories du complot.
Loin de se limiter à la sphère politique et à la « fabrique du consentement », la propagande imprègne aujourd'hui tous les aspects de notre vie en société, les spécialistes du marketing, du storytelling ou les théoriciens du nudge s'efforçant d'influencer nos choix et comportements.
Embrassant plus d'un siècle d'histoire et couvrant un vaste espace géographique, David Colon explique les fondements et les techniques de la persuasion de masse dans le monde contemporain. Il montre que la propagande n'a cessé de se perfectionner à mesure que les sciences sociales et les neurosciences ont permis d'améliorer l'efficacité des techniques de persuasion, d'influence ou de manipulation.
À travers une synthèse accessible et percutante, David Colon livre une contribution essentielle pour mieux cerner les ravages causés par la désinformation, hier comme aujourd'hui.
Poursuivant après Les Filles de noce et Le Miasme et la jonquille ses recherches sur la sexualité et les représentations qui l'accompagnent, Alain Corbin renouvelle notre perception du XIXe siècle, en lui posant une série de questions inédites, sur son rapport au temps, au corps, au désir. Les couleurs, les odeurs entrent en histoire. Stimulantes, inattendues, les traversées proposées dans ce volume dessinent le vrai visage d'un siècle trop souvent fantasmé. Alain Corbin traite ici en historien d'anxiété biologique et de préservation du risque vénérien. L'histoire de l'intime, des rapports entre les sexes et de la vie des femmes représente l'essentiel de l'ouvrage. En chemin, l'auteur souligne la répugnance olfactive à l'égard des migrants, esquisse une histoire des préoccupations écologiques, analyse la perception des nuisances industrielles. Attentif à toutes les marques qui inscrivent la vie dans le tissu du quotidien, il ne se laisse pas arrêter par les vérités établies. Quelles voies suit le désir sous le règne de la censure ? Les satisfactions qu'il s'accorde en sont-elles moindres ? Pourquoi le corps de la blanchisseuse et de la repasseuse alimente-t-il les fantasmes, tandis qu'on se méfie de celui de la bonne de maison, cheval de Troie du prolétariat ? Les secrets du siècle devront être guettés à ses carrefours.
«Dans ce livre, les bateaux naviguent ; les vagues répètent leur chanson ; les vignerons descendent des collines des Cinque Terre, sur la Riviera génoise ; les olives sont gaulées en Provence et en Grèce ; les pêcheurs tirent leurs filets sur la lagune immobile de Venise ou dans les canaux de Djerba ; des charpentiers construisent des barques pareilles aujourd'hui à celles d'hier...Et cette fois encore, nous sommes hors du temps. Plus qu'aucun autre univers des hommes, la Méditerranée ne cesse de se raconter elle-même, de se revivre elle-même. Par plaisir sans doute, non moins par nécessité. Avoir été, c'est une condition pour être.»Fernand Braudel.
La Russie est-elle européenne? Qu'est-ce qu'être russe? Depuis le XVI? siècle, la Russie entretient un lien complexe et ambigu avec l'Europe occidentale. À la tête d'un véritable État-continent s'étendant de l'Europe à l'Asie, les tsars de Russie puis les leaders soviétiques n'ont cessé de s'interroger sur l'identité de leur pays et les relations à nouer avec l'Europe, tour à tour perçue comme modèle de modernité et d'efficacité ou comme source de danger et de subversion. D'Ivan le Terrible à Vladimir Poutine, les décideurs russes ont été confrontés à ce «dilemme»:fallait-il imiter l'Europe pour mieux la dépasser, ou bien s'en protéger voire la rejeter au nom de l'eurasisme?D'une plume alerte, en s'appuyant sur un vaste ensemble documentaire, Marie-Pierre Rey explore les tourments de l'identité russe, à la croisée de l'histoire des relations internationales et de l'histoire des représentations, pour mieux décrypter les positions géopolitiques de la Russie actuelle.
Traduit dans plus de vingt langues, ce livre est le bréviaire indispensable de qui veut se familiariser avec le moyen âge.
Car, entre la légende noire d'un "âge des ténèbres" et la légende dorée d'une "belle époque" médiévale, il y a la réalité d'un monde de moines, de clercs, de guerriers, de paysans, d'artisans, de marchands ballottés entre violence et aspiration à la paix, foi et révolte, famine et expansion. une société hantée par l'obsession de survivre et qui parvient à maîtriser l'espace et le temps, à défricher les forêts, à se rassembler autour des villages, des châteaux et des villes, à inventer la machine, l'horloge, l'université, la nation.
Ce monde dur et conquérant, c'est celui de l'enfance de l'occident, un monde de " primitifs " qui transforment la terre en gardant les yeux tournés vers le ciel, qui introduisent la raison dans un univers symbolique, équilibrent la parole et l'écrit, inventent le purgatoire entre l'enfer et le paradis.
Les lieux communs ont la vie dure. Ainsi cette idée d'un Moyen Âge dualiste, qui aurait instauré une guerre entre le corps et l'âme : d'un côté, un corps coupable, source du péché, de l'autre, une âme pure tournée vers Dieu. Réfutant cette construction, Baschet montre que le Moyen Âge chrétien a développé une pensée soucieuse de valoriser l'unité psychosomatique de la personne. Ce modèle a permis de penser l'être humain mais aussi l'ordre social dont l'Église est alors l'institution dominante. Décloisonnant sa réflexion et dépassant les limites du Moyen Âge, l'auteur s'attache aux différentes perceptions de la personne dans d'autres cultures, de la Chine impériale aux sociétés amérindiennes en passant par l'Afrique ou la Nouvelle-Guinée. Un voyage comparatiste indispensable pour évaluer la singularité des conceptions occidentales de l'humain et mettre à distance l'idée moderne du moi.
John Iliffe propose ici une histoire générale de l'Afrique, des origines de l'humanité jusqu'à nos jours.Les Africains ont conquis une région du globe particulièrement hostile, au nom de toute l'espèce humaine. Le peuplement du continent, la coexistence de l'homme avec son environnement, la construction de sociétés durables et la défense contre les agressions venues des contrées les plus favorisées constituent les axes principaux de cette histoire, marquée par les blessures et les cicatrices.En consacrant une longue analyse à l'esclavage, John Iliffe montre que la souffrance se trouve au coeur de l'expérience africaine. Contre cette souffrance, les Africains ont élaboré des défenses qui leur sont propres:ils placent l'endurance, le courage et le sens de l'honneur au premier plan de toutes les vertus. Autant de valeurs grâce auxquelles ils affrontent les nouveaux défis du monde contemporain - l'instabilité politique, les guerres, la propagation du sida, les bouleversements culturels et religieux.Telle est l'histoire exceptionnelle de populations exceptionnelles:celles du Maghreb, de l'Égypte, de l'Éthiopie, de toute l'Afrique noire - une communauté de destins qui lie en une seule histoire les tout premiers humains à leurs descendants d'aujourd'hui.
«Écoute ce que l'on entend lorsque rien ne se fait entendre»... Sommes-nous encore capables, suivant le conseil de Paul Valéry, d'écouter le silence ? Nous modernes l'avons oublié, et même nous le craignons. Pourtant de grands écrivains, penseurs, savants, femmes et hommes de foi ont cultivé durant des siècles cette citadelle intérieure. À l'heure où le bruit envahit tous les espaces, Alain Corbin revient sur l'histoire de cet âge où le silence avait valeur éducative, où la parole était rare et précieuse.Redécouvrir l'école du silence, tel est l'enjeu de ce livre dont chaque citation invite au retour sur soi. Car le silence n'est pas simple absence de bruit mais condition du recueillement, de la rêverie ; il est le lieu intime d'où la parole émerge...
Le 28 juin 1914, dans Sarajevo écrasée de soleil, un certain Gavrilo Princip se réfugie à l'ombre d'un auvent pour guetter le cortège de l'archiduc François-Ferdinand... Cinq semaines plus tard, le monde plonge dans une guerre qui entraînera la chute de trois empires et emportera des millions d'hommes. Comment l'Europe, apparemment prospère et rationnelle, était-elle devenue si vulnérable à l'impact d'un seul attentat perpétré à sa périphérie ? Dans cette fresque magistrale, Christopher Clark montre que rien n'était écrit d'avance : l'Europe portait en elle les germes d'autres avenirs, sans doute moins terribles. Mais de crise en crise, les personnages qui la gouvernaient, hantés par leurs songes, marchèrent vers le danger comme des somnambules.
Une histoire de la perception olfactive soulignant le rejet à partir de 1750 dans les villes occidentales de l'ordure, la misère et la boue. Les odeurs sont neutralisées, tandis que les parfums et les soins hygiéniques connaissent une vogue grandissante auprès de la bourgeoisie
Comment connaître le climat du passé ? Quelle influence les évolutions climatiques ont-elles exercée sur les grands mouvements sociaux ? sur le paysage ? sur les récoltes ? Comment appréhender en tant qu'historien la question du réchauffement climatique ?Par ce livre fondateur, Emmanuel Le Roy Ladurie a montré le premier qu'il pouvait y avoir une histoire du climat, en réunissant la documentation nécessaire pour étudier les observations météorologiques anciennes, analyser les dates des récoltes, scruter les textes, descriptions et représentations iconographiques des glaciers...L'historiographie du climat devient ainsi une enquête minutieuse et passionnante où l'on chemine entre forêts, vendanges et mers de glace, du Moyen Âge au réchauffement récent en passant par le «petit âge glaciaire».
L'univers est gouverné par une loi générale de la putréfaction. Dieu, les anges et toutes les créatures naissent du chaos, comme les vers apparaissent à la surface du fromage. Nous sommes des dieux, et tout est Dieu : le ciel, la terre, l'air, la mer, les abîmes et l'enfer... Tel est le credo qu'un certain Menocchio, meunier du Frioul dans l'Italie du XVIe siècle, eut à défendre devant le Saint-Office avant de périr sur le bûcher. Lecteur infatigable, exégète à ses heures, hérétique malgré lui, il s'était constitué une bibliothèque au hasard des rencontres, hors de toute discipline culturelle, prélevant librement dans les textes, élaborant sa propre vision du monde.Avec cette étude magistrale, devenue un classique de l'historiographie, Carlo Ginzburg inventait la micro-histoire et renouvelait la connaissance d'un monde resté longtemps mystérieux, celui de la culture populaire.
Du monumental vase de Vix jusqu'au disque de Nebra, la plus ancienne carte du ciel connue, en passant par les premiers temples de l'humanité en Turquie ou les tunnels regorgeant d'offrandes de Teotihuacan, jamais autant de trésors n'ont été découverts que ces dernières décennies. C'est cette richesse fascinante que Jean-Paul Demoule entend explorer avec nous dans cet ouvrage.Mais au-delà de l'or des Scythes ou des pharaons, des «trésors» non moins estimables sont là, sous nos pieds, insignifiants en apparence - comme ce brin de cannabis trouvé dans une tombe chinoise - sinon invisibles - telle la séquence ADN qui a caractérisé l'homme de Denisova.Fervent défenseur de l'archéologie préventive, l'auteur montre qu'il importe de sauver ces merveilles, mais aussi de les penser pour que des mots comme «civilisation», «peuple», «culture» ou «migration» ne soient pas détournés. Fouiller, c'est plus que jamais éclairer notre avenir.