Oeuvres complètes (édition Jean-Luc Steinmetz)

Lautréamont

Résumé

Toutes les notions qui permettent de penser la littérature - auteur, lecteur, texte, genre, plagiat, parodie, humour, ironie - sont mises à la question par Lautréamont. Il nous requiert d'abord par une révolte majeure. Il nous intrigue non moins par les procédés auxquels il a recouru pour la dire : sa technique de combat. Et il nous aide à concevoir ce qu'est la fiction moderne. Mais combien de lecteurs a-t-il touché en son temps ? Une dizaine peut-être. Ouvrages non diffusés, mort précoce : les conditions d'un oubli définitif étaient réunies. Il y eut pourtant renaissance, grâce à des entremetteurs avisés, et à des rééditions, comme celle des Poésies dont André Breton alla recopier à la Bibliothèque nationale les seuls exemplaires alors connus. Au fil des ans, le nombre des lecteurs s'est accru. Et parmi eux des écrivains, accompagnateurs distants ou prosélytes inconditionnels, ont reconstruit Lautréamont en édifiant leur oeuvre propre. C'est pourquoi ce volume leur fait place : il propose une édition nouvelle de l'oeuvre - parue sous l'anonyme en 1868 (le Chant premier), sous pseudonyme en 1869 (Les Chants de Maldoror par « le comte de Lautréamont »), sous patronyme en 1870 (Poésies I et Poésies II d'Isidore Ducasse) ; puis, dans un dossier de Lectures, il donne la parole aux écrivains : les premiers médiateurs, les surréalistes ensuite, pour qui Lautréamont représente le phénomène littéraire absolu, et enfin tous ceux qui, de Césaire à Le Clézio, de Ponge à Sollers, virent en Ducasse une pierre de touche. D'autres consciences, dans l'avenir, approcheront ces textes. Le mauvais esprit des Chants ne peut que provoquer une riposte. Et le ton formulaire des Poésies en fait un vocabulaire pour le futur. Un tel « Grand Combat » n'a pas de raisons de cesser. L'oeuvre, pourtant, « s'échappe quand même » (Le Clézio). Sa violence, ses blasphèmes, ses perversions, son « cri d'ironie immense » couvrent à jamais Ducasse, irrégulier devenu régulateur, d'une enveloppe d'authentique mystère.


Sommaire

Les Chants de Maldoror. Chant premier (1868) - Les Chants de Maldoror (1869) - Poésies I - Poésies II - Correspondance - Textes d'attribution incertaine - Lectures de Lautréamont.

Rayons : Littérature > Œuvres classiques


  • Auteur(s)

    Lautréamont

  • Éditeur

    Gallimard

  • Distributeur

    Sodis

  • Date de parution

    24/09/2009

  • Collection

    Bibliotheque De La Pleiade

  • EAN

    9782070119141

  • Disponibilité

    Disponible

  • Nombre de pages

    848 Pages

  • Longueur

    17 cm

  • Largeur

    10.5 cm

  • Épaisseur

    2.4 cm

  • Poids

    358 g

  • Support principal

    Grand format

  • Dewey

    848.809

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Lautréamont

  • Naissance : 4-4-1846
  • Décès :24-11-1870 (Mort il y a 155 ans à l'âge de 24 ans)
  • Pays : France
  • Langue : Francais

Fils d'un chancelier du consulat de France de Montevideo, Lautréamont, de son vrai nom Isidore Ducasse, commença ses études chez les jésuites, avant d'être envoyé en France pour préparer le concours d'entrée à l'École polytechnique, d'abord au lycée de Tarbes (1859), puis à celui de Pau (1863). Renonçant au concours pour des raisons mystérieuses, il vint se fixer définitivement à Paris en 1867. L'année suivante, il fit paraître à compte d'auteur et sous l'anonymat le premier des six Chants de Maldoror. Le recueil complet, signé cette fois du comte de Lautréamont, fut publié en 1869 et passa totalement inaperçu. Le même accueil fut réservé à ses fragments en prose (Poésies, 1870), rédigés peu de temps avant sa mort, dont les circonstances exactes ne furent jamais élucidées. Réédités en 1874 puis en 1890, les Chants de Maldoror donnèrent prise aux jugements les plus arbitraires (on prétendit notamment que Ducasse était atteint de folie), avant d'être remarqués par les symbolistes puis exaltés par les surréalistes. Louant cette littérature de la révolte, Breton écrivit : «!C'est au comte de Lautréamont qu'incombe peut-être la plus grande part de l'état de choses poétique actuel : entendez la révolution surréaliste!.» De son côté, Gracq voyait dans les Chants de Maldoror un «!torrent d'aveux corrosifs alimenté par trois siècles de mauvaise conscience littéraire!», estimant que cette œuvre était venue «!à point nommé pour corriger dans notre littérature un déséquilibre des plus graves!». De fait, on y trouve, pour la première fois dans la littérature française, une critique lucide du langage poétique. Célébré dès le premier chant, le thème du «!mal!» libère d'étranges forces obscures et salvatrices (celles de l'inconscient) que les chants!II et IV amplifient de résonances ténébreuses.

Isidore Ducasse

Or, parallèlement à cette glorification du mal, Lautréamont déploie un art de l'ironie sans précédent dans l'histoire des lettres, se livrant à un détournement en règle des traditions du récit populaire français et du roman noir gothique, apparu en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle. Cette révolte blasphématoire se traduit sur le plan poétique par une sacralisation des fantasmes (spécialement perceptible dans le bestiaire du chant V). Quant aux Poésies, elles proposent une nouvelle manière de traiter la forme littéraire, renouvelant notamment le genre de la maxime, sous l'apparence d'un style désinvolte. Emporté par le flot quasi «!automatique!» de son débit verbal, Lautréamont s'y révèle un exceptionnel créateur de métaphores. L'exemple le plus caractéristique de cette capacité à concevoir de nouvelles images se trouve dans la série des «!Beau comme!.!» des chants V et VI, où l'auteur supprime un des deux termes de la comparaison, atteignant à la quintessence de l'effet poétique recherché par les surréalistes. Ici comme dans les Chants de Maldoror, le lecteur, sollicité par l'apostrophe et l'incantation, est prié d'accompagner l'écrivain jusqu'aux limites extrêmes de sa création : ainsi peut-il s'effacer («!La poésie personnelle a fait son temps!») et, à l'instar de son héros Maldoror, échapper à l'humanité pour servir «!les délires de la cruauté!».

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